Ça – Chapitre 2 : plus c’est long, plus c’est bon ?

Seconde partie de l’adaptation du roman de Stephen King, Ça – Chapitre 2 se concentre sur les adultes et leur nouvelle confrontation avec Pennywise, de retour pour semer la terreur 27 ans après leur première aventure. Si les longueurs et la répétition de procédés narratifs handicapent ce blockbuster horrifique, affichant 2h50 au compteur (!), l’efficacité et l’énergie créative d’Andy Muschietti sont bel et bien au rendez-vous !

 

Avant tout commencement de ladite critique, il faut revenir sur un élément fondamental : le succès démesuré du premier opus sorti en septembre 2017. Avec plus de 700 millions de dollars récoltés à travers le monde, Ça est devenu le film d’horreur le plus lucratif de tous les temps, détrônant Sixième Sens, tenant du titre depuis l’année 1999. Succès mérité, le film brillant par des qualités évidentes, telles une atmosphère très Ambin Entertainment (entre les Goonies et E.T. avec un soupçon d’horreur), une belle iconisation du clown Pennywise, remarquablement bien interprété par Bill Skarsgard, se démarquant de la précédente interprétation de Tim Curry en 1990, et une mise en scène très élégante et inspirée du réalisateur Andy Muschietti. Deux ans plus tard, ce dernier revient pour illustrer la deuxième confrontation avec Ça, les personnages étant maintenant des quarantenaires. Si dans le livre de King (ce dernier faisant d’ailleurs une apparition clin d‘œil), les deux parties étaient imbriquées, les films ont opté pour une séparation distincte entre l’adolescence et l’âge adulte. Ce choix est volontaire de la part du réalisateur, et rejoint le fait que les producteurs, suite au succès précédent, lui ont laissé carte blanche sur ce Chapitre 2, et une totale liberté créative. Pour le meilleur ?

 

Sur certains aspects, il est indéniable qu’un réalisateur de la trempe de Muschietti dont la patte artistique ne connaît plus de limite ne peut entraîner que du bon ! Faisant preuve d’une grande liberté, il laisse exprimer sa créativité visuelle en proposant de vrais moments de trouille graphiquement superbes. Prenons une des scènes pivot qui est celle de la confrontation entre Jessica Chastain et la vielle dame, bien mise en avant lors de la promotion du film. En jouant malicieusement avec les arrières-plans, la peur du noir et l’aspect grotesque de l’antagoniste aux allures de monstres peuplant les cauchemars d’enfants, la scène est très réussie. Elle est de surcroit à l’image du long métrage : un véritable rollercoaster horrifique, n’hésitant pas également à jouer sur les nombreuses ruptures de ton qui entraînent des moments comiques bienvenus. Au contraire d’un trop gros formatage de nombreux blockbusters se complaisant dans un cahier des charges avec comme seul but l‘adhésion du spectateur, voir un réalisateur qui fait son film et qui l’assume totalement est assez galvanisant aujourd’hui. Mais cette principale qualité est paradoxalement le défaut majeur de Ça – Chapitre 2.

 

Car avec une durée de près de 2h50, durée allant à l’encontre de la définition même de film de genre, le film souffre de certaines longueurs dans son deuxième tiers, plus particulièrement caractérisé par une répétition d’un schéma narratif défini pour chacun des personnages. Ces derniers, à la recherche d’un artefact destiné à combattre Ça, retournent sur un des lieux de leur enfance, occasion pour le film de procéder à un flashback avec une première confrontation avec le monstre (et une de ses nombreuses apparences), et enchaîner ensuite sur un deuxième affrontement une fois revenu à l’âge adulte. Le tout répété pas moins de 4 fois. Si on peut se prendre au jeu de deviner la nouvelle apparence de Ça, force est de constater que ce processus est rébarbatif, voire lassant. Surtout lorsque les personnages ne sont pas tous exploités de la même manière. Si la part belle est donnée à James McAvoy, Jessica Chastain et surtout Bill Hader, livrant une prestation nuancée et parfois bien loin de ses habituelles prestations comiques, l’autre partie du casting est pour ainsi dire sous employée. Mentions spéciales à Isahia Mustafa, jouant le rôle de Mike (et qui est pourtant un élément capital du film car on lui doit le rassemblement du club des ratés 27 ans plus tard), et Teach Grant en Henry Bowers tout juste sorti de l’asile, mais pas menaçant pour un sou ! Victimes collatérales d’un projet qui aurait pu voir leur personnage se développer un chouïa, mais qui a préféré se concentrer sur ses montagnes russes de l’épouvante. Bill Skarsgard, quant à lui, est toujours impeccable en Pennywise, bien que son iconisation est moins mise en avant, la surprise du premier film passé. Mais cela n’empêche pas, bien au contraire, des scènes d’une violence psychologique assez forte, où le spectateur assiste de front, comme le premier opus, au meurtre d’un bambin. Suffisamment rare pour être souligné, surtout dans une époque où la plupart des films à destination du plus grand nombre apparaissent lisses et formatés.

 

Autrement dit, si Ça premier du nom vous a séduit, vous adhérerez forcément à cette suite. Moins réussi mais plus créatif, évoquant au passage des sujets sociétaux à grande répercussion aujourd’hui (les homosexuels, les violences faites aux femmes…), le film reste une belle proposition actuelle du cinéma d’épouvante. Et s’achève même sur une note relativement touchante, nous renvoyant directement à notre pré-adolescence et à ces films au doux parfum de notre enfance. Ahhh, nostalgie, quand tu nous tiens !

 

À découvrir actuellement au cinéma Kinepolis à Saint-Julien-lès-Metz.

 

Par Kévin Beluche