Parasite : la dernière claque Made in Corée !

Grand vainqueur de la palme d’or au Festival de Cannes 2019, et toujours un carton dans les salles, « Parasite » va bénéficier pour l’occasion d’un doublage français afin de développer sa diffusion dans d’autres salles de cinéma. Par conséquent, l’équipe de Metz Today revient sur cette petite perle qui constitue à coup sûr l’un des meilleurs films de cette année !

 

Quoi que l’on en dise, le cinéma coréen ne cessera jamais de nous surprendre, tant par la radicalité de son propos que de sa mise en scène. Et ce peu importe le genre dans lequel il s’illustre, que ce soit le thriller (Memories of Murders, The Chaser, Old Boy), le fantastique (Thirst, The Host, The Strangers), ou encore le drame (Mother). Même les tentatives de ces réalisateurs sur le sol américain se soldaient par des réussites : Kim Jee-Woon avec Le Dernier Rempart, qui sentait bon les années 80 avec le grand retour de Schwarzie sur grand écran, Park Chan Wook avec l’hypnotisant Stocker, ou encore Bong Joon Ho, notre cinéaste du jour, avec le glaçant Snowpiercer – Le Transperceneige, blockbuster apocalyptique avec Chris ‘Captain America’ Evans, traitant intelligemment de la lutte des classes.

 

De lutte des classes, il en est aussi question dans Parasite. Thématique chère au réalisateur, c’est d’ailleurs le leitmotiv et le fil rouge de l’œuvre, à travers les yeux d’une famille peinant à survivre, plongée dans la précarité la plus totale. Ayant pour logement un appartement situé en sous-sol, dont la vue donne directement sur les pieds des passants, la symbolique de leur misère est renforcée par l’agencement de leur habitation, où leurs toilettes sont surélevées (même les rebuts sont supérieurs à eux) ! Profitant d’une opportunité leur permettant de travailler au sein d’une riche famille, le film procède à un tournant des plus réussis. D’un drame sociétal pincé d’humour, on passe à une farce satirique des plus réjouissantes, ponctuée d’un humour noir des plus corrosifs (et drôle) dont seuls les coréens ont le secret ! Il est en effet assez jouissif de voir comment cette famille au plan bien huilé réussit à s’immiscer dans le quotidien de cette famille aisée, dans cette maison digne d’une œuvre d’art architecturalement parlant. De dominés, ils deviennent dominants, accédant à cette strate qu’ils croyaient inaccessible.

 

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Une Palme d’Or traitant intelligemment de la lutte des classes.

 

Mais chaque plan bien huilé peut présenter le risque d’un grain de sable enrayant la mécanique. Ne dérogeant pas à la règle, cet élément déclencheur instaurera une deuxième partie plus violente, tant par le déroulement de l’intrigue que la puissance de ses images. Quand la famille rejoint son domicile d’origine en descendant dans les tréfonds de la ville, sous une pluie battante et un torrent d’eau mélangée à de la boue et d’autres détritus, c’est une chute dans l’échelle sociale s’apparentant à une véritable descente aux enfers. Enfers où les diables seraient justement représentés par les riches dans cette deuxième partie, cette dernière opérant à un renversement des tendances faisant écho à la première moitié. L’empathie que l’on éprouvait vis-à-vis d’eux, car victimes d’une tromperie, s’est immédiatement envolée à cause de leurs préjugés et perfidie involontaire. Retord scénaristique symbolisant la complexité de l’intrigue, tout comme une mise en scène aussi riche et précise que les recoins de la maison, personnage à part entière. Telle est la grande force de ce Parasite !

 

Un petit bémol tout de même : dans sa volonté de dénonciation d’une exploitation de certaines catégories sociales, le réalisateur manque un chouïa de subtilité, notamment dans sa deuxième partie. Peut-être là est le but : pointer avec véhémence certains traits de caractère, et les surligner pour en dénoncer l’absurdité. Quitte à ce que la riche famille apparaisse, à certains moments, tellement insupportable que ça en devient caricatural. Mais là encore, ce n’est qu’un grain de sable qui cette fois ci ne vient pas entacher la parfaite maîtrise et réussite de l’œuvre dans son ensemble. Car Parasite est cela : une œuvre déroutante et percutante, méritant amplement sa palme d’or, et nous hantant bien après le visionnage. À l’image de ce plan de fin, où les arrêts répétés d’une lumière symbolisent le cri d’un peuple qu’on ignore. Le genre de plan qui nous fait comprendre que le cinéma coréen a encore de beaux jours devant lui.

 

À découvrir actuellement au Klub à Metz Centre.

 

Par Kévin Beluche

 

(Re)voir la bande-annonce :