Photo de Famille : la petite surprise de la rentrée

Entre rires et larmes, tendresse et émotion brute, « Photo de Famille » est une comédie dramatique réussie et sublimée par un formidable casting.

 

Il y a deux domaines dans lesquels le paysage cinématographie français s’exerce pleinement : les comédies populaires, où s’expriment, ne serait-ce que cette année, des « réussites » au box-office du style Les Tuches 3 ou La Ch’tite Famille ; et les drames familiaux, avec très souvent un savoureux programme constitué de conflits et de tromperies, enrôlé d’un manque cruel de communication. Photo de Famille appartient clairement à la deuxième catégorie !

 

Notre long métrage du jour est un cliché d’un instant donné d’une famille dont les nombreux non-dits ont rythmé la vie. D’un côté, les parents (Jean-Pierre Bacri et Chantal Lauby), divorcés et se reconstruisant chacun de leur côté, de l’autre les 3 enfants (Vanessa Paradis, Camille Cottin, Pierre Deladonchamps), le tout chapeauté par une grand-mère atteinte d’Alzheimer (Claudette Walker). À la mort du mari de cette dernière, tout ce petit monde se pose cette question alimentant bon nombre de débats et futures discordes : que faire de Mamie ? La placer en maison de retraite ? Ou faire selon son souhait, l’enterrer à Saint Remy, sa ville originelle ?

 

 

Bien que la bande annonce laissait présager un drame autour de la maladie d’Alzheimer et des conséquences au sein de la famille, Photo de Famille va au contraire davantage s’intéresser aux relations qui unissent tous les personnages. Libre ensuite à la réalisatrice Cécilia Rouaud, dont c’est le deuxième long-métrage, de nous présenter la galerie de ces derniers, constituant de surcroit le sel du film. À ce titre, tous les personnages sont facilement identifiables de par leurs caractéristiques. On retrouve pêle-mêle la fille névrosée ne réussissant pas à avoir un enfant, la mère de famille ne cherchant plus l’amour et se battant pour garder son fils auprès d‘elle, le fils dépressif beaucoup plus à l’aise avec les chiffres et les jeux-vidéo que les relations humaines, le père de famille voulant se reconstruire après son divorce avec une fille beaucoup plus jeune… Cette juxtaposition de caractères entraîne par conséquent un scénario convenu, dont la mécanique, parfaitement huilée, l’est justement trop. À trop vouloir donner dans la caractérisation précise, Cécilia Rouaud rend son film moins naturel, assez classique et prévisible dans son déroulement, et déjà vu dans bien d’autres films.

 

Mais classique ne veut absolument pas dire raté. Loin de là ! Car Photo de Famille est pour ainsi dire l’illustration parfaite de l’adage que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes. Tout y est parfaitement exécuté, tant au niveau de la direction artistique que de l’interprétation des comédiens. Ces derniers sont justement le point fort du film, avec en tête un impeccable Jean-Pierre Bacri, s’éloignant des personnages plutôt bougons auxquels on a l’habitude de le voir, et livrant de façon juste et sobre les scènes les plus drôles du film, mais aussi les plus fortes émotionnellement parlant. Il suffit d’assister au tête-à-tête avec sa mère pour facilement s’en convaincre.

 

Photo de Famille est ainsi ce qu’on fait de mieux en matière de comédie dramatique française. Par ce réalisme des sentiments évoqués et des relations entre les personnages, le spectateur se laisse attendrir. Et se surprend même d’une douce mélancolie, à l’image des couleurs passées des photos des enfants jeunes, faites à l’aide de polaroïds.

 

Par Kévin Beluche