Spécial 97 ans : génération en voie de disparition

Et, hop, un petit coup de fil à ma grande-tante de bientôt 97 ans qui est seule dans sa maison ! En cette période de confinement, je lui sors les sujets qui m’interpellent pour ma propre curiosité et culture et afin de lui tenir compagnie plus longtemps qu’à l’accoutumée au téléphone. La guerre, la littérature, son histoire personnelle. Etrange écho avec l’actualité.

 

« Il ne faut pas regarder au-dessus de nous mais en-dessous ! ». Je profite des phrases pleine de sagesse de « Yette », ma grande-tante qui a connu l’époque de la guerre et je vous les partage pour lui rendre d’abord « femmage » (« hommage » au féminin), et vous transmettre les connaissances d’une femme qui aura 100 ans dans trois petites années et qu’il faut donc écouter avec une grande attention. Et cette première phrase signifie, à nous jeune génération, que la situation de crise va sûrement nous pousser à relativiser. Nos habitudes de consommation vont certainement être chamboulées et ce n’est pas une mauvaise chose. On commence à se rendre compte des avantages et de l’abondance de l’avant-crise.

 

« Gouverner c’est prévoir ! ». C’est Emile de Girardin, journaliste et homme politique, qui a écrit à de nombreuses reprises cette exclamative ! La meilleure manière de gouverner et d’assurer la paix, c’est donc de devancer les complications susceptibles d’amener la guerre. Cette maxime qui date de 1800 et des poussières prend tout son sens aujourd’hui.

 

Tu sauras petite que l' »on est riche que de ce que l’on donne ! » Yette me fait connaître, à travers une petite anecdote personnelle, cette citation de Sophie Swetchine, écrivaine du 19e siècle. Une très jolie formulation pour nous rappeler qu’il est important d’être généreux et de partager.

 

« Le secret du bonheur : ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire ! ». J’ai cru à une blague, mais ma grande-tante est bien sérieuse. C’est une citation qui vient de la philosophie chinoise aux alentours de 400 et 200 avant J-C. Les trois singes bien connus du grand public et utilisés souvent à des fins humoristiques ont des noms ! Mizaru, pour l’aveugle, Kikazaru, pour le sourd et Iwazaru, pour le muet. Z/Saru voulant dire à la fois le singe et la négation « ne pas ». Cela signifie en fait : ne pas voir le mal, ne pas entendre le mal, ne pas dire le mal. « C’est une façon de calmer l’esprit, d’observer la nature des choses, de réduire l’impact de la peine tout en augmentant l’amour, la bonté, la sagesse, la confiance et l’empathie. »

 

À ces beaux dictons, j’ajouterais : « La patience est mère de sûreté ». Patience, patience, le bout du tunnel est proche ! « La rareté fait la valeur des choses que l’on pense ordinaires ». C’est là qu’on se rend compte que ce qu’on avait (papier toilette… ou le droit de sortir) a une extrême valeur ! « Les idées les plus simples sont souvent les meilleures. » Applaudir nos soignants, rester confiné, se laver les mains, prendre des nouvelles de nos proches…

 

Les proverbes sont intemporels, c’est du bon sens. Ils sont remplis de vérité et d’actualité. Et comme le dit ma grande-tante : « Lorsqu’on vieillit et qu’on meurt… si on peut laisser en souvenir de belles phrases, alors on laisse quelque chose de plus important qu’un bien matériel, et comme ça on ne nous oublie pas. »

 

Bon anniversaire Yette, tiens bon.

 

Par Cécile Godot